La Journée d’Information Médicale (JIM) précédée de l’Assemblée Générale (AG) s’est tenue le samedi 24 mars 2012 à Marseille dans les locaux de l’Espace Ethique Méditerranéen.
Agenda
- Présentation de l’équipe du Centre de Compétences de Marseille – Pr Jean-Robert Harlé
- Approche ORL – Dr Eric MOREDDU, service du Pr DESSI
- Gastro-Entérologie – Dr HEYRIES
- Dermatologie – Dr KOEPPEL
- Radiologie Interventionnelle thoracique et Intervention ponctuelle – Dr CAPOROSSI et Pr BARTOLI
- Le point sur la recherche en MRO
- Introduction à la thérapie génique – Pr Henri PLAUCHU
- Remodelage vasculaire dans la MRO et perspectives thérapeutiques – Dr LACROIX, équipe du Pr DIGNAT-GEORGE
- Biothérapies cellulaires – Dr DE VOS
- Thérapie tissulaire : la greffe hépatique – Pr PLAUCHU
- Réponses aux questions posées
- Retour sur le questionnaire AMRO sur les médicaments – Dr RIVIÈRE
- MRO et grossesse – E. SERVEAU, élève du Dr Rivière
- MRO et immunité – A. GUILHEM, élève du Dr Rivière
- Réponses aux questions complémentaires
- Prise en charge et gestion du handicap MRO
- Table ronde : ALD, secret médical, discrimination, handicap à l’école
Vous trouverez ci-dessous les résumés des différentes séquences.
Présentation de l’équipe du Centre de Compétences de Marseille – Pr Jean-Robert Harlé
Nous donnons ci-après la liste des spécialistes de cette équipe :
- Médecine interne : Pr Harlé.
- Radiologie : Pr Bartoli et ses collaborateurs MM. Moulin, Petit et Gaubert.
- Pneumologie : Pr Reynaud-Gaubert (tests fonctionnels).
- ORL : Pr Dessi et Dr Michel.
- Dermatologie : Pr Berbis et Dr Mme Koeppel.
- Gastro-entérologie : Pr Bernard et Dr Heyries.
- Hépatologie chirurgicale : Pr Le Treut.
- Neuroradiologie interventionnelle : Pr Girard.
- Laboratoire d’exploration des troubles endothéliaux: Pr Dignat-George, Dr Lacroix.
- Cardiologie : Pr Habib.
Une consultation spécialisée est ouverte à l’Hôpital de La Conception tous les jeudis matin, prise de contact au
04 91 38 35 02. Après examen clinique, on y organise les bilans et les séquences thérapeutiques subséquentes.
Actuellement le service du Pr Harlé comptabilise une « file active » de 68 patients MRO pour toute la Région PACA. 13 nouveaux patients ont été inclus en 2011 dans la base CIROCCO.
Approche ORL – Dr Eric MOREDDU, service du Pr DESSI
Le diagnostic MRO est relativement simple : épistaxis, télangiectasies, antécédents familiaux. La prise en charge, en cas d’épistaxis hémorragique, consiste d’abord à asseoir le malade tête en avant. Il est pâle, présente de la tachycardie et de l’hypotension. Il faut se préparer à une possible transfusion en réalisant une NFS et en vérifiant les facteurs Rhesus et RAI. Il importe surtout de ne pas agresser la muqueuse nasale.
Pour réduire le saignement, on peut employer de la xylocaïne naphazolinée®, légèrement astringente, de la glace (à sucer), de l’eau froide, de l’EXACYL®. Le repos, l’absence de stress, sont très recommandés.
Il faut aussi écouter le patient, qui en général connaît bien sa maladie.
Lorsque la situation est plus grave, on peut pratiquer un tamponnement antérieur au SURGICEL® résorbable ou avec des alginates comme le COALGAN®.
ATTENTION : ne jamais employer de MEROCEL®, un tampon dur, qui gonfle et arrache tout !
Dans une situation encore plus grave, on peut envisager une embolisation de vaisseaux intra- crâniens à destination du nez.
- QUAND ? En cas d’anémie très prononcée, d’hémorragies récidivantes et abondantes, et en fonction du patient.
- COMMENT ? On localise la lésion vasculaire qui saigne après examen par scanner injecté. Seule l’artère carotide externe et ses branches ( l’artère maxillaire interne puis l’artère sphénopalatine) sont embolisables. L’embolisation de l’artère carotide interne qui amène à l’artère ophtalmique est à éviter.
- QUOI ? La nature du produit injecté n’est pas précisée.
Dans une situation très grave, avec un pronostic vital engagé, une solution est l’intervention de Young, qui consiste à occlure les narines, après embolisation crânienne et ligature des artères ethmoïdales. Cette occlusion chirurgicale est cependant réversible. Cette intervention n’est pas pratiquée à Marseille. Le Pr Plauchu précise qu’elle peut être pratiquée unilatéralement, s’il n’y a pas de perforation de la cloison nasale.
En réponse à une question posée par un auditeur, la réponse est qu’il n’y a pas de traitement laser ORL à Marseille. Le Pr Plauchu précise qu’il n’est pas possible de comparer les différents traitements de la MRO. Un début de synthèse comparative est en cours, mais elle est compliquée à cause de la variabilité de la réponse de chaque patient et des modifications des techniques toujours en progrès.
Une autre question amène le Dr Moreddu à préciser qu’il faut éviter les cautérisations (qui favorisent la perforation de la cloison nasale) parfois proposées en première intention par des ORL peu au fait de la MRO, surtout lors de l’adolescence.
Il faut aussi absolument éviter la pose (en urgence) de ballonnets, très traumatisants, ou de sondes à liquide froid (risques de nécrose de la muqueuse nasale).
GASTRO-ENTÉROLOGIE – Dr HEYRIES
66% des malades MRO présentent une complication hépatique, très souvent asymptomatique. Il y a 50% de complications digestives, parfois des hémorragies digestives aigües qui peuvent être localisées dans tout le système digestif, le plus souvent dans l’estomac (au fundus), puis dans le colon, (dans la région du caecum surtout), enfin plus rarement dans l’intestin grêle (mais inaccessibles au traitement).
Il faut d’abord repérer où se situe l’angiodysplasie :
- En cas d’hémorragie haute, il peut ne s’agir que du sang d’épistaxis avalé et digéré. Sinon, il faut procéder à une fibroscopie dans les 12 h qui suivent pour explorer l’estomac et le duodénum.
- En cas d’hémorragie basse, on remarque du sang dans les selles qui sont alors noires, très liquides et nauséabondes. Il faut procéder à une exploration la plus complète possible des intestins.
- En particulier, pour examiner l’intestin grêle, difficile d’accès, il faut pratiquer soit une scintigraphie, soit une entéroscopie, soit une artériographie, ou faire ingérer au malade une capsule vidéo. Il est possible d’avoir à opérer l’intestin grêle en urgence. Malgré toutes les explorations, dans 10% des cas l’hémorragie reste inexpliquée.
Quelles sont les limites des techniques d’exploration de l’intestin grêle ?
En radiologie, il est difficile de détecter les lésions planes et les zones hémorragiques ; l’examen nécessite l’absorption de 4 litres de purge (parfois mal tolérée) pour nettoyer les intestins ; enfin, le malade est soumis à un rayonnement non négligeable.
Une entéroscopie se fait sous anesthésie générale et nécessite une intubation trachéale. La technique « push and pull » (tirer et pousser) est délicate, elle ne peut pas se faire en urgence le weekend. L’entéroscopie dure 3 h. On peut explorer par voie haute et par voie basse. Cependant, seul 1/3 de l’intestin grêle est accessible par cette technique.
Complications : Pancréatites, 0,3% – saignements aggravés, 0,1% – perforation, environ 1%.
La technique idéale est la capsule vidéo ingérée. Le patient, qui doit être à jeun depuis 10 h, porte des antennes d’enregistrement des images prises par la capsule, mais il peut aller et venir. Dans la MRO, 55 à 75% des angiodysplasies intestinales sont diagnostiquées par cette technique.
A Marseille, l’examen par la capsule vidéo est prescrit en première intention. Une fois l’angiodysplasie située, le traitement consiste principalement en transfusions ou perfusions de VENOFER®. Si l’hémorragie est abondante, on peut pratiquer, par endoscopie (dans les limites énoncées ci-dessus), une photocoagulation au laser plasma-argon.
DERMATOLOGIE – Dr KOEPPEL
Les atteintes dermatologiques de la MRO sont souvent sousestimées. Il ne s’agit pas seulement d’esthétique.
Les télangiectasies cutanéo-muqueuses apparaissent généralement à la puberté et se développent par poussées tout au long de la vie. Elles sont plus ou moins nombreuses mais ne régressent pas. Elles sont principalement localisées sur la face (lèvres, menton, paupières, nez) et dans la bouche (langue, palais, gencives), sur la pulpe des doigts et au contour des ongles. Les télangiectasies actives s’effacent à la pression.
Les télangiectasies dites stellaires (ramifiées en forme d’étoile) sont plus rares. Les télangiectasies existent dans d’autres maladies génétiques ou acquises. Quatre sont citées : ataxie télangiectasie (syndrome de Louis-Bar), syndrome de Bloom, sclérodermie à type de syndrome de CREST, mastocytose télangiectasique.
Qu’est-ce qu’une télangiectasie ?
La vascularisation de la peau se fait en surface sous l’épiderme et en profondeur dans le derme. La télangiectasie est la dilatation de la veinule post-capillaire de la vascularisation sous-épidermique.
Prise en charge :
Dans un but esthétique ou si le saignement devient gênant, la prise en charge vise la destruction des vaisseaux anormaux. Le résultat est malheureusement toujours temporaire.
Techniques :
Electrocoagulation, cryothérapie, photothermolyse par lasers à colorants pulsés (rayons émis dans le spectre d’absorption de l’hémoglobine), photocoagulation par lasers YAG KTP. Les lasers YAG à impulsions longues sont moins performants. Après information du patient, on pratique un test, on fait une demande de prise en charge, puis 15 jours après on procède au traitement et à une évaluation 2 mois plus tard. Plusieurs séances sont nécessaires. On ne pratique pas durant l’été.
Contre-indications : grossesse, bronzage récent, phototypes élevés, prise d’anticoagulants, DMLA (une protection oculaire est obligatoire pendant le traitement).
Suites éventuelles : purpura temporaire, érythème, oedème, dyschromie, croûtes, phlyctènes.
Soins : brumisation, crèmes réparatrices, protection solaire avec indice 50.
Complications possibles : achromie, hyperpigmentation, cicatrices, croûtes et bulles épidermiques, bourgeon charnu, herpès.
RADIOLOGIE INTERVENTIONNELLE THORACIQUE et INTERVENTION PONCTUELLE – Dr CAPOROSSI & Pr BARTOLI
Le Dr Caporossi définit les fistules artério-veineuses pulmonaires, FAVP. Par souci de brièveté, nous vous invitons à reprendre les précédents exposés déjà publiés dans les Bulletins AMRO. En plus d’améliorer la respiration des malades, l’intérêt de traiter ces FAVP est comme on le sait d’éviter les AVC et abcès cérébraux.
Prise en charge :
Le diagnostic des FAV pulmonaires et la planification thérapeutique se fait par scanner non injecté. La procédure d’embolisation est généralement réalisée sous anesthésie locale, à condition que le patient soit « coopérant ». L’anesthésie générale peut être employée, mais dans un contexte MRO l’intubation comporte un risque d’hémorragie nasale ou buccale.
L’intervention consiste en la pose de « coils » (petits ressorts), de préférence « fibrés » ou « poilus », considérés comme la meilleure technique. Les « plugs amplatzers » (petites cages métalliques occlusives) sont positionnés au niveau de la communication artério-veineuse anormale si les vaisseaux ne sont pas trop sinueux. En cas de FAV multiples, on peut utiliser une colle biologique, l’ONYX®, mais ce n’est pas ici une technique de référence.
Les limites de l’embolisation : les particularités anatomiques du patient, la durée de l’intervention (1 à 3 heures), l’irradiation (elle a beaucoup été diminuée), la tolérance à l’iode, le risque d’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) en cas d’embolisation multiple.
La reperméation est toujours possible (8% des cas). Il faut donc installer une surveillance par imagerie et parfois réemboliser.
LE POINT SUR LA RECHERCHE EN MRO
INTRODUCTION À LA THÉRAPIE GÉNIQUE – Pr Henri PLAUCHU
Le Pr Henri Plauchu est le coordinateur du Centre de Référence MRO de Lyon. Actuellement, on ne sait toujours pas guérir cette maladie génétique chronique à son point de départ.
Les nouvelles thérapies seront-elles une solution ?
Déjà, un obstacle : dans la MRO, avant d’introduire une cellule « réparatrice » dans l’organisme du malade, il faudra d’abord réparer les gènes malades qu’elle contient dans son noyau depuis qu’elle a été créée.
Il existe différentes solutions à l’apport de matériel cellulaire sain :
- Thérapie tissulaire, par exemple la greffe de foie (voir plus loin l’intervention du Pr H. Plauchu).
- Thérapie cellulaire (voir plus loin l’intervention du Dr John de Vos).
- Thérapie génique : c’est l’apport d’un gène sain. Le chromosome défectueux est assaini par un virus qui coupe le gène malade. Ce virus est un virus naturel rendu non virulent. Cette technique est déjà tentée dans la myopathie de Duchesne ou l’hémophilie de type B.
- Thérapie moléculaire : on agit sur une mutation du gène. La gentamycine est un produit qui cache une « mutation non sens » d’un certain type sur un gène. Il s’agit d’une thérapie spécifique d’allèle par « translecture ». Cette technique ne peut s’appliquer à la MRO.
- Thérapie micro-moléculaire : si on connaît de mieux en mieux l’ADN codant pour des protéines, l’ADN non codant ne produit que des ARN dont le rôle est largement inconnu. Or certains petits ARN jouent un rôle dans le fonctionnement des 5% de matériel génétique codant qu’est l’ADN des gènes. Il est nécessaire d’approfondir la connaissance de cette régulation ADN / ARN.
- Thérapie biochimique : molécule d’anticorps anti-facteur de développement vasculaire. L’AVASTIN® en fait partie (voir ci-après l’intervention du Dr Lacroix).
REMODELAGE VASCULAIRE DANS LA MRO ET PERSPECTIVES THÉRAPEUTIQUES – Dr LACROIX, équipe du Pr DIGNAT-GEORGE
Le Dr Romaric Lacroix fait partie de l’UMR 1076 INSERM/Aix-Marseille Université intitulée « Endothelium, pathologies vasculaires et cibles thérapeutiques ». Il est basé à Marseille dans le laboratoire d’Hématologie et de Biologie vasculaire de l’Hôpital de La Conception.
Quelles sont les anomalies vasculaires dans la MRO ?
Un vaisseau sanguin est un tuyau formé de trois gaines cellulaires. De l’extérieur vers l’intérieur :
- Tunica adventicia, dont les cellules sont au contact des tissus environnants.
- Tunica media.
- Tunica intima, qui nous intéresse particulièrement. Elle est formée de cellules endothéliales organisées en monocouche de cellules en forme de pavés. L’ensemble de la tunica intima vasculaire totalise de 1 à 6.1013 cellules qui représentent 1 à 2% de notre masse corporelle.
Un stress physiologique ou biologique agresse ces cellules qui forment alors des vésicules puis se détachent de la tunica intima. Ces cellules peuvent être réparées par des cellules circulantes formées dans la moelle osseuse. Le vaisseau peut aussi réagir au stress en créant de nouveaux vaisseaux : c’est l’angiogenèse de défense.
Cette angiogenèse demande une activation pour initier la phase de remodelage et de reconstitution d’un nouveau vaisseau. Lorsque le processus est achevé, un signal biochimique arrête l’activation : c’est la résolution. Dans ces deux phases, activation et résolution, il existe de nombreux contrôles des messagers.
Dans la phase de résolution (arrêt de l’angiogenèse), intervient la voie inhibitrice du messager BMP9 qui agit sur des récepteurs comme ALK1, Eng, ou les récepteurs SMAD (1, 5, 8). Si ces récepteurs sont endommagés, comme c’est le cas dans la MRO, le messager BMP9 ne fonctionne pas, l’action de résolution ne peut pas se faire et l’action activatrice VEGF est laissée « en marche ». Le facteur VEGF active alors sans arrêt l’angiogenèse (télangiectasies, FAV), les vaisseaux continuent à se former jusqu’à faire des fistules dans certains viscères.
L’altération de ALK1 produit la forme HHT 2 de la MRO, l’altération de Eng la forme HHT 1, l’altération des SMAD une forme « syndromique » de HHT, associée à une polypose colique.
Quelle thérapeutique ?
Il existe des bloqueurs de VEGF, comme l’anticorps Bevacizumab (commercialisé par les Laboratoires Roche sous le nom d’AVASTIN®). Son action sur le facteur VEGF a été d’abord découverte de façon fortuite par l’observation d’amélioration des signes cliniques de la MRO chez un patient traité en cancérologie par l’avastin. Puis un traitement, compassionnel a été tenté avec efficacité chez une patiente Australienne MRO.
Dès 2009, la molécule a été l’objet d’un essai thérapeutique, rigoureux et officiellement déclaré aux instances internationales, par le Centre de Référence national à Lyon. L’efficacité constatée dans la complication hépatique grave (2 à 5 % des MRO) a fait l’objet d’une publication internationale qui a été jugée digne d’une des 3 grandes revues de médecine(1). D’autres molécules, comme la Thalidomide et des molécules dérivées devraient être testées mais la balance « bénéfices-risques » est plus difficile à analyser pour les épistaxis, faute de critères mesurables. D’autres pistes sont explorées en recherche animale, comme, les voies Notch ou oxydatives.
BIOTHÉRAPIES CELLULAIRES – Dr DE VOS
Le Dr John De Vos fait partie de l’Unité de thérapie cellulaire INSERM 1040 basée à l’Institut de Recherche en Biothérapies de Montpellier.
Les biothérapies cellulaires s’inscrivent dans les médecines régénératives. Leur utilisation est en cours d’étude et de validation dans les traitements de l’infarctus du myocarde, du diabète, de la maladie de Parkinson, des lésions de la moelle épinière, de l’insuffisance hépatocellulaire insulinodépendante, des brûlures graves, etc. Certaines de ces pistes peuvent encore se révéler des impasses thérapeutiques. Tout organe du corps humain se régénère en permanence : les cellules de l’organisme meurent et sont renouvelées. Cependant, le vieillissement, les pathologies altèrent ce processus naturel.
Comment régénérer les tissus lésés ? En y injectant des cellules neuves.
Comment, où, lesquelles ?
Il est difficile de trouver des cellules matures saines. La solution est donc d’utiliser des cellules souches. Ce sont les meilleures cellules régénératrices. Une cellule souche se transforme en « précurseur » qui elle-même donne une cellule différenciée spécialisée. Les cellules souches sont des cellules jeunes, immatures, non spécialisées, mais elles peuvent avoir des capacités de différenciation et de multiplication différentes selon leur origine :
- Les cellules souches unipotentes ne génèrent qu’un seul type cellulaire différencié.
- Les cellules souches multipotentes peuvent régénérer plusieurs types cellulaires différenciés (par exemple, les cellules souches sanguines, dites « hématopoïétiques » peuvent former tous les éléments cellulaires du sang : globules rouges et blancs, plaquettes).
- Les cellules souches pluripotentes peuvent régénérer tous les types cellulaires différenciés de l’organisme humain, y compris les cellules reproductrices. Sont reconnues pluri -potentes les cellules souches embryonnaires (CSE) et les cellules souches pluripotentes induites (PS).
- Les cellules totipotentes sont capables de générer un être humain entier à partir d’une seule cellule : c’est le cas de l’ovocyte (oeuf) fécondé et des 4 cellules obtenues des premiers stades de la division. Nous ne connaissons pas d’autres cellules totipotentes.
En cas de donneur et de receveur différent, on peut se heurter au problème d’incompatibilité cellulaire. D’où l’intérêt des cellules souches induites (iPS) obtenues par reprogrammation de cellules adultes (travaux japonais de 2006).
ATTENTION AUX MARCHANDS DE RÊVE qui proposent des traitements miracles pratiqués dans des conditions et avec un matériel cellulaire qui peuvent être douteux. Pour l’instant, aucune indication pertinente de l’usage des cellules souches n’est proposée dans le cas de la MRO. Tout ce qu’on peut dire c’est que les biothérapies cellulaires pourraient, en association avec les thérapies géniques (voir plus haut l’introduction du Pr Plauchu) contribuer, dans le cas de la MRO, à des stratégies thérapeutiques.
Mais cela demandera des années de recherche pure, puis des années encore de mise au point thérapeutique avant de passer aux essais cliniques…
THÉRAPIE TISSULAIRE : LA GREFFE HÉPATIQUE – Pr PLAUCHU
A propos de l’exposé du Dr Lacroix qui montre que toute agression des vaisseaux sanguins déclenche l’angiogenèse, le Pr Plauchu incite les malades à la prudence dans le traitement des télangiectasies, en particulier en dermatologie. Le mieux peut être l’ennemi du bien !
En 18 ans, 18 greffes hépatiques ont été pratiquées à Lyon sur des malades MRO, 17 femmes et 1 homme. Il semble qu’il existe une liaison entre le sexe du malade et l’atteinte hépatique dont il souffre, et 17 sur 18 avaient une mutation de ALK1.
Rappel de la vascularisation du foie :
L’artère hépatique, division de l’aorte, irrigue le foie pour 20% du transit sanguin dans cet organe. Le sang repart du foie par la veine sus-hépatique qui l’amène jusqu’au coeur par la veine cave inférieure. Le foie reçoit aussi 80% du sang qui y transite par la veine porte qui vient de l’intestin.
L’hypercirculation hépatique développée par la MRO est une souffrance pour le foie qui se porte sur le coeur où elle provoque un hyperdébit (indice cardiaque supérieur à 3,5 ou 4 qui sont les valeurs normales). La mesure de cette hypercirculation a été réalisée avec le SONOVIEW (prochaine publication) : 84% des MRO ont une atteinte du foie mais seulement 2 à 5% ont une complication cardiaque.
« Le foie parle par le coeur » : cet axiome est entièrement méconnu par les cardiologues, mais quand, dans un
contexte MRO, le coeur lâche, il faut greffer le foie car il est trop tard pour traiter le foie.
En effet, la mécanique de contraction du coeur se dérègle, parfois au point de présenter des cas de fibrillation auriculaire. Les complications de cette situation doivent être soignées par des anti-coagulants (à ne pas confondre avec les anti-agrégants, type aspirine et dérivés, totalement déconseillés dans la MRO mais qui peuvent aussi aggraver les épistaxis !!). Le choix est obligatoire.
L’hyperdébit augmente aussi la pression pulmonaire. Une solution intermédiaire entre ne rien faire et greffer le foie peut être de traiter le malade par l’AVASTIN®, mais sans attendre d’atteindre un stade cardiaque irréversible.
Rappel historique de l’intérêt de l’AVASTIN® dans la MRO :
- Un malade MRO soigné par AVASTIN® pour un cancer du colon voit ses épistaxis améliorés.
- Du bevacizumab (nom de l’anticorps commercialisé sous le nom d’AVASTIN®) est administré à une malade MRO australienne arrivée à un état critique (débit cardiaque multiplié par 2, foie doublé en volume). En 6 mois la malade a retrouvé un état normal.
- Le premier essai AVASTIN® est réalisé à Lyon sur 25 malades MRO. Sa publication en mars 2012 dans le Journal of American Medical Association (JAMA) va ouvrir de nouveaux horizons thérapeutiques, bien qu’on ne connaisse pas encore en détail la réponse globale du système vasculaire d’un individu à ce traitement.
L’AVASTIN® a un effet drastique sur les épistaxis – hélas pas chez tous les malades. Mais il ne peut être administré en injections intraveineuses pour traiter « seulement » les épistaxis ou les hémorragies digestives (mélénas) : d’où le prochain essai de spray nasal à la phase I (toxicité, effets secondaires) duquel a participé l’Association.
L’AVASTIN®, non testable sur les atteintes neurologiques, n’a pas d’effet identifié sur les malformations artério-veineuses pulmonaires et il peut donner des effets secondaires non négligeables en cas d’antécédents de maladies cutanées : ainsi les ulcères variqueux, dus à un défaut de vascularisation de la jambe, peuvent être aggravés par l’AVASTIN®. Le problème des nécroses biliaires semble beaucoup plus en relation avec l’évolution naturelle de la maladie et un traitement trop tardif…
RÉPONSES AUX QUESTIONS :
Où en est la recherche ?
Quatre travaux importants ont été présentés par les Français en mai 2011 au congrès bisannuel International entièrement consacré à la maladie de RO :
- AVASTIN® dans les complications hépatiques
- Echographie hépatique par SONOVIEW® qui remplacera les scanners trop irradiants
- Résultats de l’essai ATERO sur les effets de l’EXACYL® : effet positif modéré, pas de contre indication sauf un terrain de thrombo-phlébite.
- AVASTIN® en spray nasal : le taux de pénétration sans dommage de la muqueuse porcine étant de 59%, on peut donc espérer une bonne pénétration de la muqueuse nasale humaine. Il faut maintenant étudier les effets secondaires (essai ELIPSE actuel à Lyon). L’essai ALEGORI sera l’objet d’une étude clinique multicentrique qui sera lancée à la rentrée 2012 après l’obtention de crédits, l’avis de l’AFSSAPS, et pour laquelle un PHRC a été demandé en 2012. On espère les premiers résultats en septembre 2013, leur publication à la mi-2014 en même temps que la mise à disposition des malades, en milieu hospitalier vu le coût du produit, la technique d’administration et d’autres surprises encore possibles.
Y a-t-il un moyen terme entre le traitement à l’AVASTIN® et la greffe hépatique ?
On ne peut ligaturer le foie, ni l’emboliser : risques de nécrose, d’encéphalopathie hépatique… Un consensus a
été établi à ce sujet en 2005. Le projet METAFORE (AVASTIN® / le foie malade) doit faire l’objet d’un suivi clinique à long terme. Concernant chaque malade, la question est : quand faut-il commencer ce traitement, combien de temps faut-il le poursuivre, peut-on recommencer un traitement interrompu ??? Y a-t-il un âge limite ?
Une greffe hépatique est-elle définitive ?
La réponse pourrait être non. Sur la période de suivi des greffes réalisées (18 ans), nous n’avons qu’un seul exemple, récent, peut-être 2 sur 18, d’une greffe « recolonisée » par la MRO.
RETOUR DU QUESTIONNAIRE AMRO SUR LES MÉDICAMENTS – Dr RIVIÈRE
Le Dr Sophie Rivière est la coordinatrice du Centre de Compétences de Montpellier.
Fin 2011, ce questionnaire a été envoyé aux adhérents de l’AMRO pour connaître leur « ressenti » à propos de trois médicaments, le FERINJECT®, le raloxifène (EVISTA®) et les oestroprogestatifs (pilule anti-conceptionnelle) et, pour les deux derniers, leur éventuel impact sur les épistaxis.
FERINJECT® : sur 10 expériences rapportées, la tolérance est bonne dans 8 cas, moyenne pour 1 cas, mauvaise pour 1 cas qui rapporte des douleurs abdominales.
Raloxifène (EVISTA®) : sur 3 expériences rapportées, 1 rapporte un effet positif sur les épistaxis, 2 n’ont constaté aucun effet.
Oestro-progestatifs (pilule anti-conceptionnelle)
- Les femmes qui prennent ou ont pris une pilule contraceptive ont noté pendant cette période de leur vie:
- une amélioration sur les épistaxis (3 cas /5)
- pas d’amélioration sur les épistaxis (2/5)
- Après arrêt de la pilule contraceptive les femmes ont noté :
- une aggravation des épistaxis (5/7)
- aucun effet sur les épistaxis (2/7)
(Ces observations sont à rapprocher des constats faits par les femmes de l’effet naturel de la ménopause sur les épistaxis.)
- Après la ménopause, la prise d’une pilule contraceptive :
- améliore les épistaxis (5/6)
- est sans effet (1/6)
(Il semblerait que les effets des pilules contraceptives après ménopause dépendent aussi du choix de la pilule.)
Cet échantillonnage est trop faible pour en tirer des conclusions et pour poursuivre une étude clinique, mais les résultats en sont intéressants malgré les facteurs de risque liés à l’usage des pilules contraceptives augmenté de ceux de l’âge. Ils pourraient être discutés dans le Réseau médical RO.
MRO ET GROSSESSE – E. SERVEAU, élève du Dr Rivière
Cette étude, qui fait l’objet de la thèse en Pharmacie de E. Serveau, a débuté en 2009 à Montpellier et à Lyon.
59 femmes MRO nées après 1954 et totalisant 129 grossesses ont été interrogées. Il apparaît que :
- les chances d’être enceinte sont pour les femmes MRO de 2,2 enfants/femme, supérieur à la moyenne nationale. On pourrait même se demander si la MRO n’est pas un facteur favorable peut-être parce qu’elle procure à la nidation une « bonne » vascularisation ;
- le nombre de fausses couches est faible (11,6%) – le Dr Claire Shovlin, de Londres, l’estime inférieur à 6%.
Y a-t-il plus de risques pour la mère MRO ? Oui.
- La grossesse augmente la pression circulatoire, or les vaisseaux RO se fragilisent en se dilatant (loi de Laplace).
- Les FAV se développent et se compliquent. Cependant une seule complication d’une FAVP a été notée (contre 1,6% dans la littérature).
Il importe donc d’effectuer des contrôles avant et après la grossesse : sur les 129 grossesses de l’échantillon, 27 MAV ont été dépistées avant la grossesse (ce qui est peu et insuffisant) et 29 après.
Y a-t-il plus de risque pour l’enfant ? Non, à l’exception bien sûr du risque génétique. Les risques sont même plus faibles que la moyenne nationale (cependant une hypoxie sévère due à des fistules disséminées multiples pourrait porter préjudice au foetus).
Les saignements sont-ils aggravés pendant la grossesse ?
- 24% des cas ont saigné davantage, 15% moins.
- 15,5% des télangiectasies ont augmenté, mais de façon réversible.
- 7 grossesses sur 129 ont vu s’aggraver les FAVP.
Peut-on soigner les FAVP pendant la grossesse ? Oui, il a même été procédé à une embolisation.
Peut-on pratiquer la péridurale ? Oui, moyennant certaines précautions comme :
- vérifier par IRM l’existence ou l’état des FAV neurologiques ;
- 80% des accouchements par voie basse sont sans complication mais, s’il existe une FAVP ou une FAV neurologique, il faut pratiquer une césarienne pour éviter à la parturiente des efforts de poussée trop violents ou trop prolongés.
Faut-il accoucher dans un Centre de Compétences ? C’est mieux. Sinon, veiller à ce que l’obstétricien se mette en relation avec le Centre de Compétences.
Peut-on mener autant de grossesses que l’on désire ? Oui, et sans complications particulières.
Faut-il en général prendre des précautions ? Oui, comme scanner thoracique, IRM médullaire, surveillance de la tension artérielle et du niveau en Fer, enfin prévenir l’anesthésiste.
A la QUESTION « y a-t-il dans la MRO une relation entre les risques et l’âge de la femme », la réponse est : non. De toute façon il vaut mieux concevoir jeune !
MRO ET IMMUNITÉ – A. GUILHEM, élève du Dr Rivière
La mRO n’est pas une maladie infectieuse par essence. Cependant les FAVP peuvent se compliquer d’ abcès cérébraux car elles diminuent l’efficacité du filtre bactérien que fait le poumon. Pour les épistaxis, ce sont leurs traitements ORL, les méchages, qui augmentent les risques infectieux. On s’est posé aussi la question d’une possibilité de moindre immunité lié à la génétique de la MRO.
Risque infectieux
Il existe deux types d’infection, peu sévères ou sévères :
- Infections peu sévères, type les infections ORL qui ne nécessitent ni hospitalisation ni antibiotiques.
- Infections sévères qui imposent une hospitalisation et un traitement antibiotique. Elles sont peu étudiées et ce qui les favorise est inconnu. Une seule étude descriptive a été menée par le Dr Sophie Dupuis-Girod à partir des données de H.Plauchu qui, en 2005, avait des informations sur 353 patients sur 20 ans : 15% ont présenté une infection grave, 1/3 d’infections cérébrales (abcès multibactériens sur antécédent de FAVP), 2/3 d’infections extra-cérébrales qui ont atteint les os ou le système articulaire (implication du staphylocoque doré). Ces infections majorent la durée des épistaxis.
Le risque infectieux est supérieur dans un contexte MRO.
Le risque infectieux est essentiellement lié à des facteurs mécaniques comme perte de l’effet « filtre » du poumon dans les FAVP, ou le méchage prolongé des épistaxis qui amène une prolifération bactérienne dans le nez. Ces bactéries passent dans le sang et affectent d’autres organes. Les traitements sont relativement efficaces
Y a-t-il une anomalie des défenses immunitaires dans la MRO ?
Les défenseurs de l’immunité sont les globules blancs :
- polynucléaires neutrophiles, les soldats.
- lymphocytes B, qui émettent des anticorps.
- lymphocytes T, qui attaquent les microbes.
- macrophages, qui effectuent le nettoyage du champ de bataille.
Toutes ces cellules communiquent entre elles par l’intermédiaire de molécules comme les cytokines, dont fait partie le TGFβ. Dans la MRO, les récepteurs de TGFβ que sont ALK1 et Eng sont mutés et la réception du messager TGFβ se fait mal, ce qui induirait un défaut de fonctionnement des défenses immunitaires. Les globules blancs eux-mêmes sont-ils moins efficaces ? Ce n’est pas prouvé.
En revanche, il semble que les globules blancs se déplacent moins vite. Cette réponse altérée varierait selon les individus. A. Guilhem a mis au point le protocole ROCX-4 qu’il conduit sur 3 groupes de 20 malades RO. Ce protocole vise à quantifier les signaux et la vitesse de déplacement des cellules immunitaires dans la MRO.
Une bourse Scheuer a été attribuée à A. Guilhem pour cette étude.
Il est donc important de prévenir la survenue des infections :
- Dépistage des FAVP pour prévenir les abcès cérébraux et protocole préventif très règlementé pendant les traitements des FAVP.
- Antibiothérapie réglementée préventive en cas de soins dentaires ou de soins des voies ORL supérieures.
RÉPONSES AUX QUESTIONS COMPLÉMENTAIRES
Q : Quelles précautions doit-on prendre pour utiliser la pilule
contraceptive après la ménopause ?
R : Dépistage gynécologique, mammographie. La surveillance doit être annuelle.
Q : Peut-on indiquer préférentiellement une pilule ?
R : Aucune étude comparative n’a été faite. Les pilules les plus citées dans le questionnaire sont DESOBEL® et MINIDRIL®. Le Pr Plauchu propose, pour intéresser les gynécologues et évaluer le risque par rapport au bénéfice, un essai « contrôlé » sur 6 mois avec études des grilles d’épistaxis remplies pendant ces essais par le centre de compétence/référence qui suit la patiente. C’est la seule façon de se faire une idée… mais qui ne fera pas office de preuve
Q : Y a-t-il un effet de la ménopause sur les épistaxis ?
R : Oui. En 2005, le Pr Plauchu avait observé 1/3 de variation en plus, 1/3 en moins, 1/3 stable.
Q : A partir de quand peut-on considérer que la MRO est stabilisée ?
R : Si aucune complication due à la MRO n’est apparue avant 60 ans (FAVP, foie), il y a peu de risque d’en développer ultérieurement. La « pénétrance » de la maladie est complète aux environs de 55 ans : avant 55 ans, on ne peut jurer qu’on n’a pas la MRO. Si, à partir de 55 ans, aucun symptôme ne s’est manifesté, on peut raisonnablement penser être à l’abri. Il faut penser aussi que les moyens techniques de diagnostic se sont affinés et que l’on peut faire maintenant un diagnostic qu’on n’aurait pas eu les moyens de réaliser il y a quelques années. En tout état de cause, le typage génétique est la meilleure façon de « savoir », mais il existe des formes de MRO dont les mutations ne produisent pas de symptômes, et des malades ayant une mRO typique dont on ne retrouve pas forcément la mutation responsable.
Q : Pourquoi en cas de grossesse réaliser une IRM médullaire soit avant d’être enceinte (parce qu’on a été prévoyant !) soit aux 6 mois après le début de la grossesse ? (parce qu’on n’a pas anticipé !!!…). Pourquoi pas entre les deux ?
R : C’est à la fois lié à la technique péridurale et au principe de précaution.
Q : Les enfants présentent-ils des symptômes ?
R : Il existe des cas pédiatriques de MRO, surtout neurologiques, parfois pulmonaires (de la naissance à 18 ans), et aussi des épistaxis précoces.
Q : Peut-on sauter une génération ?
R : Il est rappelé que la transmission est dominante. Un individu qui fait partie des 50% des enfants qui ont hérité le gène muté MRO d’un de leurs parents, père ou mère, pourra le transmettre à la génération suivante. Un individu qui fait partie des 50% des enfants qui n’ont pas hérité le gène muté MRO d’un des parents, père ou mère, ne pourra transmettre ce qu’il n’a pas reçu.
Q : Peut-on prendre des anti-coagulants lorsqu’on a la MRO ?
R : OUI s’il s’agit de véritables anti-coagulants comme héparine ou anti-vitamine K qui peuvent être prescrits en cas de phlébites et qui n’augmentent pas forcément les épistaxis. NON s’il s’agit d’anti-agrégants, comme ASPIRINE® et dérivés type ASPEGIC® ou KARDEGIC® ou autres.
Q/R : Qu’en est-il de l’essai ATERO sur l’intérêt de l’EXACYL® pour la MRO ? 111 malades ont été testés sur 132 inscrits. On a noté un petit effet assez variable. Des antécédents de thrombophlébite sont un critère négatif. Un article est actuellement soumis à la revue Lancet.
Q : Comment traiter l’anémie ?
R : Pour l’anémie, il ne faut pas se fier au pourcentage d’hémoglobine, mais à la tolérance clinique du malade.
Q : Faut-il prescrire du VENOFER® ?
R : Cela aide si les saignements sont répétés et chroniques. Mais cette solution ne remplace pas la transfusion sanguine (réservée plutôt aux anémies aigües).
Q : Les pneumothorax spontanés sont-ils décrits en MRO ?
R : Les pneumothorax spontanés ne sont pas un signe connu habituel de la mRO.
Q : Quels produits utilise-t-on dans l’embolisation crânienne ?
R : Le nez fait bien partie du crâne. Les micro-billes sont utilisées de préférence, mais elles ne tiennent pas et peuvent diffuser. Cette diffusion n’est pas un signe inquiétant mais traduit plutôt la cicatrisation de l’artère. L’« agent liquide » ONYX® est une colle « définitive », très efficace au cas où le pronostic vital est engagé, mais il ne permet pas la réembolisation sur le même site, ce qui peut être gênant en cas de revascularisation : il faut toujours penser au futur.
PRISE EN CHARGE ET GESTION DU HANDICAP MRO – TABLE RONDE
- Mme M. ARANGUREN, Défenseur des Droits en PACA
- Dr R. LAGET, DRSM Paca Corse (CNAMTS)
- M. J-P. ABBOU, Inspecteur départemental de l’Académie d’Aix-Marseille en charge des enfants handicapés
- Pr H. PLAUCHU puis Dr S. RIVIERE
- Présidence Pr J-R. HARLE
AMRO France – HHT a voulu cette table ronde parce que nous nous sommes aperçus qu’entre 16 et 50 ans, les
malades RO hésitaient à faire reconnaître leur maladie par crainte d’être socialement pénalisés. On peut comprendre cette attitude. Malheureusement, elle entraîne souvent une minimisation de l’atteinte de la MRO, ce qui peut avoir des conséquences médicales graves. Au cours de cette journée médicale, l’attention des auditeurs a été attirée sur l’importance de diagnostiquer à temps les FAVP ou les infections ORL et de les prévenir, de suivre attentivement le déroulement de la grossesse, etc.
Comment concilier la prévention de la MRO, qui implique la déclaration symptomatique, et donc clinique, de la maladie, avec les exigences de la vie réelle : pour les enfants prise en charge scolaire, pour les adolescents choix et exercice d’un métier, pour les adultes obtention de crédits, adaptation du travail ou mise en invalidité, pour les seniors prise en charge dans les structures ad hoc… Quelles sont les nouvelles dispositions légales, améliorent-elles les conditions de vie des malades RO ? Comment, malgré ces difficultés professionnelles, administratives ou financières, amener les malades à consulter préventivement et si possible en famille ?
Les intervenants qui nous ont fait l’honneur de participer à ce débat représentent des instances capables de nous dire clairement comment déclarer notre état de malade, l’importance de cette déclaration pour bénéficier ensuite d’une prise en charge adaptée, quelles sont les contraintes sociales liées à cette déclaration et comment y faire face, comment et dans quelles conditions notre milieu professionnel peut être adapté, comment et dans quelles conditions le milieu scolaire peut accueillir nos enfants et adolescents qui présentent des symptômes MRO.
Nous ne pouvons ici donner le détail de ce débat, nous allons essayer d’en faire la synthèse thème par thème. D’emblée, le Pr Plauchu précise que chacun a des droits mais aussi des devoirs : droits en cas de gêne réelle pour le suivi médical, et devoir de se faire soigner en toute honnêteté et sans abus.
ALD 31 (liste complémentaire des Affections de Longue Durée) :
Pourquoi se déclarer en ALD 31 ?
- Bien que le parcours clinique de la MRO soit balisé par des examens pratiqués par des médecins compétents et reconnus, les patients éprouvent réellement de grosses difficultés vis-à-vis de certaines caisses d’assurance maladie, en particulier pour la prise en charge des transports, même justifiés par les médecins référents.
- Par ailleurs, le développement thérapeutique de médicaments hors Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) mais inscrits dans la Liste des Actes et Prestations (LAP) du Protocole National De Soins (PNDS) autorise leur usage hors du milieu hospitalier, mais à condition que le malade soit inscrit en ALD 31 pour justifier de leur achat en officine. Et ils sont souvent fort coûteux.
- Existe-t-il des actes non remboursés ? Par exemple un suivi, un diagnostic, un dépistage ?
Il est conseillé de ne faire une demande d’ALD 31 que lorsque la maladie est déjà suffisamment évoluée pour que la nécessité d’une prise en charge financière ou d’un aménagement professionnel soit posée. Une atteinte légère ne nécessite pas de demande d’exonération du ticket modérateur au titre de l’ALD 31.
Lorsqu’une demande d’ALD 31 est posée au bon moment, à savoir lorsque la maladie présente des signes cliniques patents et nécessite des prises en charges thérapeutiques et un suivi régulier conformes au référentiel HAS (Haute Autorité de Santé) elle est acceptée par le service médical de l’Assurance Maladie.
Concernant la prise en charge des transports, la demande d’entente préalable est obligatoire dans certains cas (transports supérieurs à 150 km, transports en série…). Il s’agit d’une prescription et non d’une simple formalité administrative. En cas de refus médical, l’assuré a la possibilité d’une voie de recours, l’expertise L 141.1 du Code de la Sécurité Sociale. En cas de refus administratif, l’assuré peut saisir la commission de recours amiable et éventuellement le TASS (Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale).
Au régime général, un arrêt de longue maladie (art. L 324.1 du CSS) ouvre droit à une période d’arrêt de travail indemnisée de 3 ans. Au cours de cette période d’arrêt, plusieurs évolutions sont possibles :
- Une reprise spontanée par l’assuré.
- Une reprise en mi-temps thérapeutique pour une durée limitée (ne dépassant pas 3 mois en moyenne), puis reprise à temps complet.
- Une reprise à l’initiative du médecin conseil avec rapprochement du médecin traitant et le cas échéant du médecin du travail (si un aménagement de poste est à prévoir).
- Une stabilisation avec mise en invalidité à l’initiative du médecin conseil (catégorie1, catégorie 2, catégorie 3). L’invalidité est appréciée sur un état global et sur la réduction de capacité à se produire des gains. L’invalidité est prononcée si la réduction de capacité de se produire des gains est supérieure aux 2/3.
Il faut savoir que l’invalidité n’exclue pas l’exercice d’une activité professionnelle et que la Caisse Primaire veille à la règle du cumul, à savoir que la somme « pension d’invalidité + salaire » chez un invalide soit inférieure ou égale au salaire d’un assuré non invalide.
Lorsqu’un invalide travaille, il se rouvre des droits aux indemnités journalières. En Région PACA, sur 68 malades RO suivis par le Centre de Compétences de Marseille à la fin mars 2012, 34 ont été admis en ALD 31 pour la période 2011 – 2012.
SECRET MÉDICAL :
Le secret médical est normalement partagé entre médecins traitants référents généralistes ou spécialistes, entre eux et avec les médecins conseils de la CNAM qui peuvent être amenés à demander aux précédents des informations complémentaires sur le malade. Il s’oppose:
- à un médecin non référent,
- au médecin du travail,
- au médecin conseil d’une compagnie d’assurances,
- à la famille si le patient le demande.
Le questionnaire médical déclaratif des compagnies d’assurances ne doit jamais comporter des questions sur :
- la sexualité,
- la vie privée,
- les tests génétiques.
Il faut savoir que les critères internationaux de diagnostic de la MRO sont cliniques, la génétique n’est qu’une confirmation « personnelle ». Les malades RO asymptomatiques n’ont surtout pas à donner leur détermination génétique ! Mais si des symptômes existent, il faut les signaler obligatoirement.
ATTENTION au libellé des formulaires et courriers des assurances. Elles travaillent actuellement à mettre leurs questionnaires en conformité avec les règles déontologiques. Concernant le régime des fonctionnaires, il semble « moins protecteur » que le régime général.
DISCRIMINATION :
Madame Aranguren précise qu’un refus de transport n’est pas une discrimination, c’est un refus de service. Exemple de discrimination : si un employeur, qui n’est pas censé savoir que son employé est malade et de quoi, pénalise ses « trop » nombreuses absences par un refus d’avancement dans sa carrière, ou par un licenciement, il s’agit alors d’une discrimination – pourvu que les absences soient réellement justifiées par l’état médical de l’employé. L’employé est alors en droit de faire appel au Défenseur des droits (ex HALDE).
- Dans le cas d’une maladie évolutive, comme l’est la MRO, il faut évaluer le malade aujourd’hui, pas dans l’avenir.
- L’aménagement du poste de travail est une reconnaissance du handicap.
HANDICAP À L’ÉCOLE :
Nous avons des remontées de parents et d’enseignants qui s’inquiètent de la prise en charge des enfants dans le cadre scolaire lorsqu’ils manifestent des symptômes de la maladie comme par exemple épistaxis, essoufflement et fatigue.
Nous avons aussi des remontées de parents qui s’inquiètent des limites que peut apporter la HHT à l’orientation professionnelle de leurs enfants et surtout de la façon dont cette limitation leur est annoncée, voire imposée. Elle peut être vécue comme une stigmatisation, et ce n’est pas une bonne façon de commencer une vie socio-professionnelle, surtout si l’on sait qu’elle sera forcément, un jour ou l’autre, compliquée par le développement de la maladie, même si l’on ignore a priori quelle sera la nature et la gravité de ce développement.
M. Abbou nous apprend que :
- Dans les écoles primaires ou au collège, la mise en place d’un Protocole d’Aide Individuelle, ou PAI, peut être demandée par les parents ou par le médecin scolaire au chef d’établissement, qui peut en prendre lui-même l’initiative. Ce PAI permet au personnel, enseignants ou auxiliaires, de pratiquer certains gestes thérapeutiques en dehors de la présence d’un personnel de santé.
- En cas de nécessité pour l’enfant de quitter l’école, temporairement ou définitivement, en raison de son état de santé, la loi (2005) fait obligation à l’Education Nationale d’assurer la continuité du service éducatif : de ce fait, l’Education Nationale assure l’enseignement à domicile ou à l’hôpital, même au-delà de l’âge scolaire.
- La prise en charge du handicap à l’école est reconnue par le Conseil Général via la MDPH (Maison du Handicap) : elle assure la compensation du handicap par un Projet Personnalisé de Scolarisation (PPS) qui met en place un auxiliaire de vie scolaire, un équipement spécial, etc.
- La formation de conseillers d’orientation psychologique est en cours : pour un adolescent handicapé, passer du rêve à l’acte dans le choix d’un métier peut être douloureux.